La leishmaniose canine, une maladie parasitaire qui progresse
La leishmaniose canine est une maladie due à un parasite unicellulaire (Leishmania infantum) qui se développe à partir des ganglions du système lymphatique.
La leishmaniose est une maladie vectorielle
Les leishmanies sont essentiellement transmises par les piqûres de phlébotomes, des petits insectes volants (2 à 3 mm) qui ressemblent à des moucherons très pâles et qui se nourrissent de sang, comme les moustiques.
Les phlébotomes, les vecteurs majeurs
Seules les femelles phlébotomes piquent et elles le font à la tombée de la nuit. Leur repas s’effectue en plusieurs fois, par une succession de piqûres, sur un ou plusieurs individus. Dans les zones où vivent ces insectes, un chien peut subir plusieurs centaines de piqûres de phlébotomes par nuit s’il dort à l’extérieur !
Une température de 18 à 22°C est idéale pour ces insectes. Les phlébotomes préfèrent aussi l’arrière-pays aux zones côtières car ils craignent le vent (les ventilateurs les font fuir !). Ils sont particulièrement abondants dans les forêts situées à quelques centaines de mètres d’altitude.
La période d’activité des phlébotomes démarre en général en mars-avril et se termine en octobre-novembre. Le risque de transmission de la leishmaniose est maximal en septembre-octobre, car le taux d’infestation des insectes par les leishmanies est plus élevé en fin de saison, quand les insectes ont piqué de nombreux animaux potentiellement contaminés.
Autres voies de transmission
La leishmaniose canine peut aussi être transmise par d’autres voies que les phlébotomes : le parasite peut passer directement d’un chien à l’autre lors de l’accouplement, de la reproduction (de la mère aux chiots), d’une transfusion sanguine, ou même d’une morsure.
Quand un chien vivant dans une zone indemne de leishmaniose est contaminé pendant un séjour dans le Sud et qu’il revient chez lui, il est donc susceptible d’être à l’origine d’un nouveau foyer de leishmaniose, même en l’absence d’insectes vecteurs.
Extension géographique de la maladie
Quels que soient les symptômes présentés par le chien, il faut toujours penser à la leishmaniose si le chien vit (ou a séjourné dans les mois précédents, ne serait-ce que quelques jours) dans une région où les étés sont secs et les températures hivernales douces (10°C en moyenne entre octobre et mars).
La zone d’activité des phlébotomes (et donc la zone à risque de leishmaniose) englobe surtout la Provence, les Cévennes, les Alpes Maritimes, la Corse et les Pyrénées Orientales. Avec les modifications climatiques, la maladie s’étend cependant jusqu’en vallée de la Loire et on trouve de plus en plus de phlébotomes dans les collines de moyenne altitude du Massif central. La maladie remonte aussi la vallée du Rhône. Des foyers de leishmaniose canine existent également dans des zones plus éloignées comme l’Auvergne, l’Oise et la Gironde.
Les déplacements nombreux des chiens en période de vacances contribuent évidemment à l’extension de la zone à risque. L’évolution de l’habitat joue aussi un rôle : le développement des zones de villas en banlieue des villes du Midi de la France, avec des plantations régulièrement arrosées et des chiens de garde, est favorable à l’implantation des phlébotomes.
La leishmaniose évolue à bas bruit
La période d’incubation de la leishmaniose canine peut aller de 3 mois à plus d’un an, ce qui facilite la diffusion de la maladie puisque les chiens contaminés ne sont pas facilement identifiables au début. On estime que pour un chien malade, 4 à 5 sont porteurs de la maladie sans l’exprimer.
Les chiens qui ne présentent aucun signe de leishmaniose tout en étant infectés présentent un danger : les parasites qu’ils hébergent sont en effet susceptibles de contaminer les phlébotomes qui eux-mêmes peuvent les inoculer à l’homme à l’occasion d’une piqûre.
Dépistage chez les chiens sans symptômes
Dans les régions où la leishmaniose est présente, il est donc important de faire effectuer un dépistage par votre vétérinaire afin de savoir si votre chien est ou non infecté par la leishmaniose. De même, si vous avez emmené votre chien dans une zone à risque pendant les vacances, ce dépistage peut s’avérer utile au retour.
Il est possible de détecter les chiens porteurs de leishmanies grâce à un test sérologique : l’analyse d’une simple goutte de sang peut mettre en évidence la présence d’anticorps anti-leishmanies, prouvant que le chien a été en contact par le parasite. Le vétérinaire peut ainsi évaluer le statut d’un chien vis-à-vis de la leishmaniose en seulement 20 minutes.
Symptômes de la leishmaniose
Les signes de la leishmaniose peuvent être extrêmement variés : cela va d’un simple abattement passager (accompagné parfois de fièvre et d’une perte d’appétit) à des troubles pouvant toucher pratiquement tous les organes.
Chez les jeunes chiens, la leishmaniose peut évoluer très rapidement mais en général, les signes de leishmaniose apparaissent à la faveur d’une autre maladie, lorsque l’organisme est affaibli, et l’état général du chien se dégrade alors lentement, de manière chronique, pendant plusieurs mois.
Certaines races canines sont prédisposées à la leishmaniose, telles que le dobermann et le boxer.
Lorsque la maladie atteint un stade avancé, le chien maigrit, ses muscles fondent, ses articulations sont douloureuses, les ganglions hypertrophiés deviennent apparents, son poil tombe, sa peau s’épaissit et des ulcères cutanés se développent un peu partout sur le corps. Le chien peut aussi présenter des saignements de nez, des écoulements oculaires, de la diarrhée et avoir les yeux tellement irrités qu’il ne supporte plus la lumière. Les « ongles de fakir » sont un autre signe de la leishmaniose : les griffes du chien malade poussent exagérément et se déforment.
Quand le chien présente une leishmaniose grave, l’euthanasie est malheureusement souvent la seule solution. Pour ne pas en arriver à cette solution dramatique, les chiens vivant en zone à risque doivent donc être régulièrement suivis.
Un traitement long et incertain
Le traitement classique de la leishmaniose consiste à empêcher le parasite de se multiplier dans l’organisme, en administrant des médicaments qui bloquent la synthèse des protéines indispensables aux leishmanies. Ces médicaments ont malheureusement souvent des effets secondaires, tels que l’insuffisance rénale ou la formation de calculs urinaires, comme c’est le cas avec l’allopurinol.
La décision de traiter ou non un chien leishmanien est difficile à prendre car le traitement est long, difficile, coûteux et les rechutes sont fréquentes. De plus, un chien malade représente toujours une menace pour la santé humaine. Certains médicaments efficaces ne sont d’ailleurs pas utilisés chez le chien car ils sont réservés en priorité à l’usage humain : il faut éviter que ne se développent des résistances.
Le traitement peut cependant être recommandé pour les chiens infectés qui ne manifestent pas de symptômes car il retarde l’apparition des signes cliniques.
Prévention de la leishmaniose
La meilleure façon de protéger les chiens de la leishmaniose est d’empêcher le chien d’être piqué par des phlébotomes. Tout chien séjournant dans une zone infestée par les phlébotomes doit être protégé, même si c’est seulement pour la période des vacances. La prévention de la maladie passe par l’utilisation d’insecticides efficaces contre les phlébotomes, éventuellement associée à la vaccination lorsque les chiens sont soumis à un risque important.
Insecticides efficaces contre les phlébotomes
Traiter les chiens avec un insecticide à effet répulsif du printemps à l’automne constitue la principale mesure de prévention de l’infection par la leishmaniose.
En matière d’insecticide, les plus utilisés dans la lutte contre les phlébotomes sont la deltaméthrine et la perméthrine, des substances synthétisées sur le modèle de molécules extraites d’une variété de chrysanthème. Elles associent un pouvoir insecticide immédiat contre les phlébotomes et une faible toxicité pour le chien et ont aussi l’avantage de ne pas perturber l’odorat du chien.
Attention cependant à ne jamais utiliser un produit à la perméthrine ou à la deltaméthrine sur un chat qui ne les tolère pas : les cas d’intoxication féline sont fréquents chaque année.
Les colliers répulsifs
Lorsqu’un chien porte un collier imprégné de deltaméthrine, le principe actif diffuse progressivement dans la couche superficielle de l’épiderme. Un effet répulsif se fait sentir vis-à-vis des phlébotomes et, s’ils entrent quand même en contact avec le chien, ils sont tués avant d’avoir eu le temps de le piquer. Le risque de transmission de maladie est donc écarté.
Les colliers imprégnés de deltaméthrine ont montré une très bonne efficacité sur les chiens : le taux de protection contre les piqûres de phlébotomes va jusqu’à 90 % et certains colliers restent actifs au moins 5 à 6 mois. Il est fortement conseillé de faire porter ce type de collier à tous les chiens qui vivent ou séjournent passagèrement dans les zones à risque de leishmaniose. En Espagne, dans la région de Madrid, la population de lièvres s’avère par exemple très fortement contaminée et entretient le cycle du parasite.
Il faut quelques jours pour que l’efficacité optimale du collier soit atteinte. Il doit en général être placé sur le chien 7 à 10 jours avant l’exposition aux phlébotomes (bien lire les recommandations du fabricant).
Autres présentations insecticides
L’application d’un d’insecticide en pipette spot-on ou en spray sur le chien est également efficace mais l’effet ne dure en général pas plus que 3 à 4 semaines. Ce type de présentation est plus adapté aux chiens séjournant temporairement dans une zone à risque qu’à des animaux exposés toute la saison aux phlébotomes. Une pipette est en général efficace 48 h après l’application : pensez à traiter votre chien avant de partir en vacances !
Rentrer le chien le soir ?
Les chiens qui passent la nuit dehors sont les plus exposés aux piqûres de phlébotomes. Rentrer son chien à l’intérieur au crépuscule est donc souvent conseillé mais cette mesure ne suffit pas : la petite taille des phlébotomes leur permet de passer à travers les grilles des moustiquaires et on les retrouve souvent à l’intérieur des habitations. Pour renforcer l’efficacité des moustiquaires, il faut les vaporiser d’un produit insecticide.
Évitez surtout de tondre votre chien car le pelage le protège partiellement des piqûres d’insectes, sauf au niveau du chanfrein et des pavillons des oreilles, zones souvent visées par les phlébotomes.
Vaccination contre la leishmaniose
Un collier ou une pipette insecticide ne peut pas garantir une protection à 100 %. Pour les chiens vivant dans une zone à risque de leishmaniose, il est donc conseillé de les vacciner. En France, deux vaccins sont disponibles pour protéger les chiens contre cette maladie. Tous les chiens de plus de 6 mois (indemnes de leishmaniose) peuvent être vaccinés. L’immunité se met en place en moins d’un mois et les rappels sont à effectuer annuellement.
Avant de vacciner votre chien, le vétérinaire vérifiera que le chien n’a pas déjà été contaminé par la maladie. Vacciner un chien déjà porteur de leishmanies est en effet inutile. Le chien pourrait finir par développer la maladie, même si l’évolution est généralement très lente : plusieurs années s’écoulent entre la contamination et l’apparition des symptômes.
Le vaccin n’empêche pas forcément l’infection mais il permet de réduire significativement le risque de développement des symptômes de la maladie, ainsi que la charge parasitaire dans l’organisme. Associer des produits insecticides avec la vaccination est officiellement reconnue comme la technique la plus performante pour limiter l’extension de la leishmaniose.
Même si le coût de la vaccination contre la leishmaniose canine n’est pas négligeable, rappelons que cette maladie peut coûter très cher au propriétaire du chien car elle évolue souvent pendant plusieurs années.
Leishmaniose et santé humaine
En protégeant les chiens contre la leishmaniose, on diminue le risque de contamination humaine car les chiens infectés sont des « réservoirs » et restent des sources de contamination pour les insectes vecteurs.
Un chien leishmanien peut constituer un risque pour son entourage, surtout s’il vit à proximité d’une personne immunodéprimée. Les cas de transmission directe (ex : par contact avec une plaie infectée) sont exceptionnels mais, si le chien vit dans une région où des phlébotomes sont présents, un chien contaminé, même porteur sain, entretient le cycle parasitaire. Les leishmanies présentes dans son sang peuvent être absorbées par les phlébotomes lors des piqûres et les insectes contamineront ensuite d’autres mammifères dont l’homme…
Même si la maladie affecte également d’autres animaux (renard, lièvre, blaireau, cheval, chat…), c’est le chien qui est surtout à l’origine de la contamination humaine.
FAQ
Les pays du sud de l’Europe comme l’Espagne, le Portugal ou l’Italie sont très touchés par la leishmaniose canine. Pensez-y si jamais vous adoptez un chien dans un de ces pays (des associations proposent par exemple des lévriers espagnols (des galgos) à l’adoption, quand ils ne sont pas aptes à chasser).
Avant d’arriver en France, le dépistage de la leishmaniose doit être impérativement effectué, pour éviter tout risque de propagation de la maladie.
La leishmaniose féline existe mais dans la plupart des cas, le chat ne montre aucun symptôme et il paraît très résistant à la contamination. Des symptômes peuvent cependant apparaître chez des chats immunodéprimés, par exemple s’ils sont porteurs des virus FIV et/ou FeLV. Lorsque la maladie se déclare, elle provoque le plus souvent des lésions cutanées.
Les colliers à base de pyréthrinoïdes, actifs contre les phlébotomes, sont en général efficaces contre les autres insectes volants (moustiques) ainsi que les puces et les tiques. Certains colliers contiennent d’autres molécules qui augmentent encore leur efficacité.
Il est très important de choisir un collier antiparasitaire externe en fonction des risques encourus par le chien, de sa taille, de son mode de vie, etc. Par exemple, si le chien se baigne régulièrement, il faut s’assurer que le collier résiste à l’eau. Demandez conseil à votre vétérinaire.
Pour en savoir plus
La leishmaniose (source : ESCCAP France)
Les phlébotomes (source : ESCCAP France)
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